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  • Papa

    Je suis née pour que tu m'apprennes la vie. Étais ce toi l'homme penché au dessus de mon berceau. Ce visage flou que je me rappelle souvent? Étais ce toi le premier homme de ma vie? L'homme dont je ne retiens que les absences. Je te cherchais. Je te réclamais. Et quand tu étais là, c'est comme si tu ne l'étais pas. A quoi pensais tu? Timidement, j'ai voulu mille fois lever la main vers toi. Te donner la main et que tu ne la lâches pas, et que tu me montres comment on vit. Tu étais si grand, et moi si petite. Je levais la tête vers toi, et je cherchais ton regard qui déjà me fuyais. Quand je jouais, je sentais ton regard sur moi. Lourd. Tu me sondais? Tu apprenais à me connaître. Comme si ne nous pouvions ne nous aimer que de loin. Et j'ai grandis. Nous nous aimions de loin. En silence. Par frôlement. Une choregraphie parfaitement orchestrée. Si par hasard on se retrouvait dans la même pièce, un silence effrayant s'installait. Qui étais tu toi? D'où venais tu? Où étais tu hier? Où seras tu demain? Je suppliais en moi même, parles moi, parles moi. Dis moi ta vie, dis moi tes rêves. Tu étais un étranger si familier que ça me troublais. Comment peut on grandir auprès de quelqu'un sans rien savoir de lui? Des bribes d'histoires, des instants volés, des souvenirs voilés. Encore aujourd'hui quand je pense à toi, un immense vide s'empare de moi. Un abysse colossal de rien. Des questions, des regrets. De la colère. Colère étouffée, jamais dite. Tout ces actes manqués, ses paroles ravalées, ses espoirs déçus. Le tableau est noir, gris, tâchés. Plus jamais il ne sera beau parce que j'ai oublié les couleurs. Il y en a eu peut être. Des instants colorés, des éclats de rires. Des jeux avec toi. Peut être même que tu as été fier de moi, un jour. Et je ne le sais pas. Le noir a gagné, le morne, le creux, le triste. Le temps qui passe a voilé le reste. Le temps cruels qui ne recule pas, mais avance chaque jour plus vite, plus fort, plus dur. Le temps ne m'a pas laissé profiter de toi. Tu étais là et absent, et quand tu étais absent je t'imaginais pensant à moi, peut être. Des fois, je dis papa, PaPa, papapapa. Et je me demande à qui je m'adresse. Tu étais mon père. Tu es mon père. Mon papa n'existe pas. J'ai eu un père, et pas de repère. Je me suis perdue, et retrouvée seule. Je me suis faite de tes manquements, de tes actes barbares. Je suis faite de cette part de toi que je ne connais pas. Cet enorme pont d'interrogation qui tout les jours flotte sur ma vie, et qui fais que je me sens moitié moi. Ou trois quart moi. Il en manque un bout. Papa, papa. Quand tu seras là, alors je serais entière.